CACHECACHE(CACHE)
PATRICIA CAMET, STERLING CRISPIN, TARIK KISWANSON
VERNISSAGE LE 4 JUIN, EXPOSITION JUSQU'AU 4 JUILLET 2015
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Passant la main derrière l’écran d’une machine radiographique, le personnage principal de La Montagne magique (1924) découvre sous la plume de Thomas Mann son être squelettique :
« Hans Castorp vit ce qu’il avait dû s’attendre à voir, mais ce qui, en somme, n’est jamais fait pour être vu par l’homme, et ce qu’il n’avait jamais pensé qu’il fût appelé à voir ; il regarda dans sa propre tombe ».
La radiographie, qui est en somme une expérience banale, a dans ces termes un authentique pouvoir de révélation quant à la nature essentiellement finie de l’homme qui a depuis développé une passion immodérée pour son monitoring. Surveiller pour punir, évidemment Foucault murmure encore à nos oreilles, mais surveiller aussi pour pré-voir, anticiper, sauver, récompenser. Le contrôle à distance n’est plus le domaine exclusif du politique. Vie privée, for intérieur et convictions pour ce qui est du corps social, rythme cardiaque, courbes du sommeil et taux de sucre dans le sang pour ce qui est du corps humain: l’individu se soumet au regard omniscient et culpabilisateur des appareils de l’Etat, de la finance, de la publicité, des assurances et des réseaux sociaux où il répète à l’envie le schéma d’une servitude volontaire exploitée par ses propres données. La mine de nos informations tourne à plein régime pour irriguer bon nombres d’opérateurs qui œuvrent chaque jour à l’interfaçage d’un post-prolétariat, c’est-à-dire de consommateurs qui créént sans intermédiaires les valeurs de Facebook, Uber, Airbnb ou eBay. Comme rien ne s’y perd, il a fallu consacrer en lieu et place du devoir de mémoire, un droit à l’oubli.
CacheCache(Cache) se situe là, entre une histoire affectée de l’homme, de ses pratiques et de sa mémoire, et leurs projections dans des formes inhumaines, c’est-à-dire étrangère à sa nature. Spécifiquement développé pour L’Île, l’exposition est articulée autour de trois différentes acception du masque, motif étrange tout à la fois du culte, du jeu et de la dissimulation que l’on retrouve comme porte-voix sur les visages des acteurs antiques, sur les morts, les chamans et les libertins, sur les hackers d’Anonymous et bien d’autres encore. Ceux que présentent l’artiste péruvienne Patricia Camet, l’artiste suédois Tarik Kiswanson et l’artiste américain Sterling Crispin, dessinent une trame archéologique où se confondent plusieurs histoires alliant minimalisme et crafting oriental, impérialisme Inca et surconsommation, données numériques et surveillance technologique.
La notion de cache, qui prend un sens particulier dans l’espace souterrain de Johan Fleury de Witte croise les champs de l’art, de l’anthropologie, des cultes et des médias. CacheCache(Cache) résonne avec la notion d’antémémoire qui, en informatique, enregistre temporairement des copies de données provenant d'une autre source de donnée, afin de diminuer leur temps de chargement. L’exposition, dont on ne peut ignorer la nature souterraine revendique une collusion entre trois artistes venus d’horizons divers dont les pratiques se chargent les unes les autres pour mieux s’illustrer.
Alexis Jakubowicz
© 2021 GALERIE L'ÎLE - +33 (0)6 15 79 03 13
PETITE PIÈCE
WILLEM BOEL
13 OCTOBRE - 13 NOVEMBRE 2014
VERNISSAGE LE 13 OCTOBRE 2014, 18-21H
VUES D'EXPOSITION
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Moteur. Action.
Willem Boel entre dans le champ. Avec son bonnet noir remonté aux oreilles, sa barbe safranée et son clop aux lèvres, il a des allures de docker ou bien de ferrailleur, d’un type en tous les cas taillé d’un corps-machine, prêt à presser, tirer, lever, porter, fraiser. A l’écran, un châssis métallique nouvellement soudé, dont le dessin évoque une chambre à soufflet, un trapèze éventré, monté d’une manivelle. Boel en saisit le manche et se met à tourner. Le maneton, auquel est imprimé la force, entraine dans son axe une caissette en bois, tendue dans toute la longueur par de gros fils de fer. Les câbles, alors, se tressent dans l’engrenage et le mobile, soumis à plus forte tension, est conduit à sa dislocation.
Imagine it’s a garden shed est de ces objets d’art qu’on peine à reconnaître. En premier lieu c’est une séquence tournée par un artiste, qu’on aura pourtant mal à qualifier comme œuvre-vidéo. C’est un volume aussi, mais un volume qui ne revendique en rien les qualités de la sculpture. Enfin c’est un mouvement, sans drame, qu’on s’interdit de nommer performance. De quoi s’agit-il donc?
Deux images surgissent en indice: la main trapue et silencieuse de Richard Serra tâchant de saisir au vol des morceaux de plomb pendant le temps qu’ils mettent à tomber sur le sol (Hand Catching Lead, 1971) ; et celle de Calder, sur son tapis de jeu, élançant seschevaux, trapézistes et lanceurs de couteaux en chiffon devant la caméra de Jean Painlevé (Le Grand Cirque Calder, 1955). Du premier, Boel a dans son film comme on l’a pressenti la ligne et la couleur : une silhouette sombre appliquée à la force. On revoit le portrait de Serra, visage carré, le regard droit, le cou légèrement épaissi monté sur des épaules en trapèze elles aussi, sanglé dans une salopette; son avant-bras surtout, contracter nerfs et muscles sur sa main comme un piège, noircie par le travail. Il y a de ça dans la présence de Willem Boel. Et puis il y a Calder dans cette mise en scène à l’esthétique foraine. La machine par laquelle le jeune artiste belge torture son mobile a tout d’un orgue de barbarie – qui tombe à point nommer. L’artiste s’y présente comme un tourneur de manivelle et l’on croirait, avant qu’il ne l’active, entendre un air de cirque. Mais l’automatophone se fait briser les os dans le son du métal, qui frappe à chaque tour de bras comme une horloge menaçante. L’action, plus qu’un programme, est une définition de l’art de Willem Boel en tant que « mouvement, substance vitale et arrêt de mort ».
Considérons qu’ « au fil de leur vieillissement, les œuvres d’art sont animées de mouvements internes. Soumises à des tensions structurelles contradictoires, leurs surfaces succombent bien souvent à ces forces qui s’opposent. Le bois finit par se fendre, la peinture par s’écailler et la patine par se décoller. » Tout ici convient si ce n’est que chez Boel, l’entropie n’intervient pas au gré d’un vieillissement. A la différence des machines de Calder ou Tinguely, le mouvement n’est dans les siennes jamais conditionné par la conservation – bien au contraire. Ainsi la décomposition qu’il entreprend par soustraction est appliquée positivement dans ses moulins. Montés sur des structures rotatives de tailles et lignes différentes, des toiles sont chargées de peinture, toujours par le même geste, à mesure qu’elles défilent sous un pinceau. Ces carrousels sur pieds sont encore dans le langage de Willem Boel des révélateurs résiduels. Car de l’action qu’il entreprend toujours, l’artiste entend garder la trace. Ni la machine ni le mouvement ne sont vraiment à l’origine de l’œuvre ; ce sont pour lui les conditions de tournage – le temps, la météo, l’humidité etc. qui donnent à ce qu’il nomme « résidus » leurs qualités plastiques. De fait les toiles réalisées sur ces manèges ne sont pas composées, plutôt décomposées par amas successifs de matière à chaque tour de piste. Immédiatement nouvelles et aussitôt figées dans leur propre exercice, ces œuvres sont encore assez difficilement nommables. Elles révèleront pourtant dans les chambres de L’Île pareille nature à l’orgue exhibé sur Youtube ; car à bien y songer, elles sont essentiellement cinématographiques.
C’est aux motifs industriels que tient d’abord le rapprochement, tant de fois souligné par l’artiste dans son outillage. Les « résidus », précipités de toutes sortes d’expériences menées par des engins de son invention, pourraient aussi bien être amassés par l’action d’un aimant baladé comme un pendule au dessus d’une carcasse. Des fonctions mécaniques portées par des enjeux divinatoires, voilà qui donne à l’entreprise de Willem Boel des attraits de voyance. Dans la cave de Johan Fleury de Witte, on s’attendrait à voir les moulins tournoyer sur eux-mêmes et pour une petite pièce révéler notre avenir sur panneaux monochromes. Ainsi les appareils manifestent un pouvoir d’attraction, semblable aux boîtes magiques et lumineuses qui ont de foire en foire ravi le public parisien à la fin du 19ème siècle. Le mouvement, intrinsèque à la pratique sculpturale et picturale de l’artiste belge est sur le tapis rouge empreint d’une pâte foraine. La brutalité des formes sert la fascination des visiteurs qui s’engouffrent au passage, presque clandestins, dans un au monde parallèle que Willem Boel, malgré ce qu’il prétend, maîtrise sur toute la ligne. Un détail contraint pourtant notre petite théorie: pour chaque pièce l’artiste produit un second appareil, une mise en lumière dont il décide scrupuleusement l’intensité, l’emplacement, la portée. Ces machines là encore ne tiennent aucune nomination : malgré tout le soin qu’on leur prête, elles ne sont ni des œuvres ni des meubles au yeux de la création. Elles ne sont que de simples outils à l’appui des moulins, venues a priori avec un lot de matériel dans le transport de cette exposition. Ces lampes ou projecteurs n’ont dans leur rapport à la peinture qu’une « fonction-régie ». Candides, au parti pris de Boel sur l’empreinte des choses, nous avions parié que ces machines avaient pour tâche d’enregistrer ses gestes quand il s’agit en fait de les projeter. Les toiles évidemment, rendues à leur statut d’écrans, perchées sur leurs moulins, réfléchissent la lumière de leurs doubles ampoulés. On voit l’espace devenir un palais des glaces opaques, nous conduire au fond de L’Île, où l’art est dans la boîte.
Alexis Jakubowicz
Paris, 15 septembre 2014
OUTRESOL #2
COMMISSARIAT DE JOËL RIFF ET MATHIEU BUARD AVEC JEAN BAPTISTE BERNADET, RÉMY BRIÈRE, MIMOSA ECHARD, MAUDE MARIS, LINA SCHEYNIUS, ET SANS JOHN ARMLEDER
VERNISSAGE LE JEUDI 16 JANVIER 2014 DE 18H À 21H
VUES D'EXPOSITION
©NICOLAS BRASSEUR
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Le terme Outresol est une fabrication, il engage un espace, panorama ou caverne qui produit l’écrin ou l’écran suffisant d’une perception sensible spécifique prise dans un mouvement. L’outre est la posture du devenir, d’un dépassement nécessairement éprouvé, d’un changement d’état et de statut. L’outre s’invente dans un mouvement, une dynamique croissante telle une libération, un excédent heureux mais contingent de son point de départ. L’outre, c’est la volonté d’un advenir. Le sol est une condition, un socle, un support, d’un territoire.
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L’Outresol c’est alors la tentative de travailler sur la frustration du regard, et de sublimer l’expérience interrompue, de mettre en tension le regard du spectateur. Il s’agit en d’autres termes de porter une lecture narrative, récit individualisé, dans l’expérience et le déplacement du spectateur et d’apporter un point de vue clivant, un point de concentration sur l’extraordinaire de l’œuvre, sur son étrangeté autant que sa toute disponibilité à être contemplée, comme les fruits d’une nature heureuse.
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Ce second volet observe et planifie l’aberration, optique, physique, fantasmée, des modes de compositions et de perceptions. Cette trajectoire déplacée n’est plus exactement prise dans un mouvement conventionnel, mais extra-vagante, étymologiquement parlant. Les œuvres inscrites dans ce terrain seront à contourner, à excaver, à discerner : le spectateur, explorateur, géologue, fera l’expérience parcellaire d’une vision désagrégée, éclatée comme un kaléidoscope qui, apposé sur ce lieu, définit un regard où s’offre à voir de façon concomitante et pourtant différé, un foyer de discontinuités saisissantes.
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Les agencements, contractés, distribuent des éléments ascendants et descendants, qui pointent un milieu, un chemin en Outresol et implicitement conduisent les corps. L’œuvre, seule, se définit alors tel un agrégat convexe qu’il faut déplier, forme concentrée et brillante dont le centre n’est pas identifié clairement, et qui de fait se déjoue, indémasquée. Cette imperméabilité, c’est alors aussi ce qui fait écran : paroi, verticalité, ensemble de plans quoi qu’il en soit obturés. Aussi, les émergences et suspensions activent les circulations et déplacent les densités pour le spectateur. Elles jouent comme les composantes d’une terre, sédimentation qui formalise une impesanteur. Ce qui tombe, ce qui monte, ce qui vient au devant, ce qui s’efface dans une profondeur concave, motive la perception. Le hors champ surgit comme un récit parasite, qui détourne et pose des aberrances supplémentaires.
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Sous cette voûte, rien ne fixe définitivement le rapport des échelles et cela désarrime les œuvres d’une certification. Les fragments élémentaires, telle une irruption bouillonnante de fossiles, font corps en s’éloignant d’un type ou d’un système médian. Cette série d’observables installée en Outresol, apparaissent dans ce sentiment d’un inquiétant familier, dont la représentation est acquise mais dont la fiction anime les interprétations. L’absence d’une focale majeure se pose pour le spectateur comme l’enjeu, la quête de la compréhension des niveaux de définition, de la netteté, d’un mode de représentation. Focale et foyer bousculent l’affirmation de la surface comme devenir netteté, le mur comme proposition d’une dimension appliquée, la masse comme format. L’aberration produit une image manquante, empreinte de décompositions, de déformations, de disruptions, de diversions, d’écarts, étrangement. Les calcifications de merveilles sont alors une perspective, selon une succession de vertiges perceptifs.
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Ainsi se présente l’estuaire de nos diffractions.
FORTE TAILLE EN EAU DOUCE
ANTOINE DOROTTE
OCTOBER 11 - NOVEMBER 11 2014
OPENING OCTOBER 11, FROM 6 TO 9PM
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La galerie ACDC et Johan Fleury de Witte présentent, du 11 octobre au 16 novembre 2013, la première exposition personnelle d’Antoine Dorotte à Paris. Intitulée Forte taille en eau douce’’, cette exposition s’articule autour d’une œuvre recente produite à l’occasion de son exposition à la Galerie Édouard Manet de Gennevilliers. «Antoine Dorotte développe une pratique du dessin, de la sculpture et de l’animation autour d’une technique très ancienne, la gravure sur métal. Il produit par un travail lent et obstiné, dans un aller-retour entre techniques passées et actuelles, des images instantanées où se mêlent, par rapprochements et glissements multiples, des différences et des emprunts aussi bien à la culture savante qu’à la culture populaire.»1 En 2011, Antoine Dorotte a recu le prix MAIF pour la sculpture.
A l’occasion de cette exposition, il presente une sculpture in situ, réalisée et produite lors de son exposition à la galerie Edouard Manet à Gennevilliers. Si l’œuvre est la même,
l’espace qui l’accueille cette fois lui donnera une toute autre densité. Loin de l’esprit des white cube, il est question ici, de pierre, de voûte et de sous-sol. Le titre de l’exposition, « Forte taille en eau douce’’ », rappelle par la présence de ’’, qu’il s’agit d’une seconde étape pour la monstration de l’œuvre. «La sculpture Forte taille est constituee de tubes et de coudes de zinc utilises pour la fabrication des gouttieres. Elle se deploie au rythme d’ondulations dans l’ensemble de l’espace. Sans debut ni fin, elle semble se prolonger au-dela des limites des murs de pierre. Sa surface travaillee a l’aquatinte produit des effets moires. Coupée en deux en son centre, du sulfate de cuivre d’un beau bleu curacao s’echappe et goutte sur un tetraedre en cuivre. L’agressivite du liquide erode et grave sa surface selon une logique aléatoire dans laquelle destruction et creation sont intimement liees.»2 Également «Une serie de trois estampes de moyen format. Avec pour toile de fond le Black Canyon, deux d’entre elles representent des elements de Forte taille evoluant en milieu naturel. Dans la troisieme apparait une boule a ecailles en reference à deux pièces plus anciennes, Una misteriosa bola (2011) presentee a la Fiac en 2011 et produite par la Biennale d’Anglet, et sa version reduite, Bloom From Shop of Horrors (2012) produite par 40mcube à Rennes.»3
Ces deux sculptures construites selon les principes des domes geodesiques de Buckminster Fuller ont en commun avec Forte taille, leur rapport à l’architecture et au monde sauvage et reptilien. Une sélection de travaux (dessins et video) sera egalement presentee dans cet espace prive et intimiste. L’exposition est visible tous les jours sur rendez-vous.
*123 Lionel Balouin
OUTRESOL #1
COMMISSARIAT DE JOËL RIFF ET MATHIEU BUARD AVEC FLORIAN BÉZU, MIREILLE BLANC, SYLVAIN COUZINET JACQUES, ANNE LAURE SACRISTE, LINA SCHEYNIUS ET SANS ROBERT MALAVAL.
MAY 2-29, 2013
OPENING MAY 2, FROM 6 TO 9PM
VUES D'EXPOSITION
©NICOLAS BRASSEUR
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Du 2 au 29 mai 2013 sur rendez-vous au 5 quai de Bourbon, "L'ile", l’Ile Saint-Louis à Paris
Ainsi que les vendredis de 18h à 20h et les samedis et les dimanches de 17h à 18h
avec
Florian Bézu
Mireille Blanc
Sylvain Couzinet Jacques
Anne Laure Sacriste
Lina Scheynius
et sans
Robert Malaval
Commissariat par Mathieu Buard & Joël Riff
Le terme Outresol est une fabrication, il engage un espace, panorama ou caverne qui produit l’écrin ou l’écran suffisant d’une perception sensible spécifique prise dans un mouvement. L’outre est la posture du devenir, d’un dépassement nécessairement éprouvé, d’un changement d’état et de statut. L’outre s’invente dans un mouvement, une dynamique croissante telle une libération, un excédent heureux mais contingent de son point de départ. L’outre, c’est la volonté d’un advenir. Le sol est une condition, un socle, un support, d’un territoire.
Cet Outresol, prend pour ce cycle d’expositions les formes de la caverne, celles d’une grotte et comme une scène que, prise sous une voûte multiple et des sols dénivelés, l’on penserait et dessinerait tel un panorama intérieur. Les œuvres inscrites dans ce paysage sont à collecter, le spectateur incarnant cet explorateur, géologue, dont l’expérience parcellaire approfondit par la déambulation la question d’une expérience interrompue. Du dédale, il conviendra de sortir avec sinon un savoir, au moins une masse sensible. Dans la caverne, et notamment sous la voûte marquée et décuplée d’une galerie, il semble pertinent de penser le mode d’exposition comme un vecteur de conduite d’un regard narratif, de l’attrait de fédérer, agréger des œuvres mais de soutenir l’idée d’une interruption, d’une frustration heureuse pour le regard. Produire par le display la retraite suffisante pour susciter un manquement que, si l’œuvre ne se livre pas entièrement, le spectateur éprouve le désir et dont il prend la pleine conscience.
Ce qui alors est le sujet du panorama c’est le cœur ; l’attention est portée sur une zone médiane, flottante, hors sol. Une œuvre est comme un panorama tout autant, elle est conçue comme telle par l’artiste. L’œuvre se livre, concentrée du regard exhaustif de l’artiste. De là, voir tout, comme l’implique un panorama, c’est la condition de l’œuvre qui se donne constituée, toute à voir, d’un seul trait. Or, il est question, d’une expérience interrompue de la lecture des œuvres, d’une difficulté à se concentrer pleinement et de saisir totalement l’intégralité de la continuité sensible de l’œuvre. Force est de constater que l’expérience d’une œuvre est souvent interrompue par le lieu, le contexte, l’échelle, les autres, la qualité, la temporalité, en somme de la réduction du spécifique au divers.
L’expérience interrompue serait la difficulté d’une lecture continue, la difficulté d’une installation de tenir l’occupation du sol, de la sculpture brimée d’une perception globale, du détail comme fragment élémentaire et comme limite d’une perception globale, de la difficulté d’une attention soutenue, de la dilution du regard et ou sa capture. La grotte, figure majeure du lieu de la retraite autant que d’une fouille, d’un espace d’extraction et comme scène première nous intéresse alors. Elle propose les conditions d’une oscillation de la perception. Et de cette acuité dirigée défalque, du tout, un fragment.
L’Outresol développe cette dynamique de l’interruption, jouant sur la qualité des médiums des œuvres et leurs limites donc : la vidéo comme n’ayant pas de support clair, de réceptacle si communément admis qu’un écran, mais lequel ? De la tragédie des petites œuvres comme prises et coincées de leurs valeurs par le socle. En effet, les aspérités et strates verticales de cette cave complique ou diffère l’accès à la qualité de présent des œuvres, telles que sur les parois d’une caverne, les plis de roches cacheraient volontairement les brillants et les fruits de ses agrégats minéraux. Le spectateur découvre alors, mineur sans autre outil que son regard, les esquisses de prodigues, tenus par les crocs d’une matière neutre.
L’Outresol c’est alors la tentative de travailler sur la frustration du regard, et de sublimer l’expérience interrompue, de mettre en tension le regard du spectateur. Il s’agit en d’autres termes de porter une lecture toute narrative dans l’expérience et le déplacement du spectateur et d’apporter un point de vue clivant, un point de concentration sur l’extraordinaire de l’œuvre, sur son étrangeté autant que sa toute disponibilité à être contemplée, comme les fruits d’une nature heureuse.
Ainsi se présente l’observatoire de ces éclats.
MATHIEU CHERKIT
MAY 6 - 22, 2011
OPENING, APRIL 6 FROM 6 TO 9PM
VUES D'EXPOSITION
©MARIE-AMÉLIE TONDU
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Johan Fleury de Witte hosts Mathieu Cherkit at "L'Ile" an intimate location on the Ile Saint Louis in Paris.
Spotted at the well-known « Salon de Montrouge » in 2010, Mathieu Cherkit is a graduate of the Ecole Nationale Supérieur des Beaux Arts in Nantes.
He also had the opportunity to study at the "Hochshule für Grafik und Buchkunst" in Leipzig in Neo Rauch’s atelier, where he met important actors of the “New Leipzig School” like artists Matthias Weischer and David Schnell.
This experience explains his ability to use colors and matter with force and dynamism. Mathieu Cherkit’s painted scenes transform patterns, geometry and space and hustle the established lines of figurative painting. Beaux Arts Magazine describes him as a « virtuoso painter », and you will have the opportunity to discover him at the hanging of his work Friday, May 6th at 6pm and until May the 22nd by appointment.